« Variation et approche polynomique : pour une conception plurielle de la langue à l’école calédonienne » par Claire Colombel-Teuira & Véronique Fillol (2021)


09-02-2021

En ce début d’année 2021, Claire Colombel-Teuira (membre associée à l’équipe ERALO) et Véronique Fillol (membre permanente ERALO) publient un nouvel article interrogeant la prise en compte de la diversité linguistique et culturelle dans l’école calédonienne. Dans cette contribution, les chercheuses proposent, fortes de plus de 20 ans d’expérience d’enseignement-formation, des outils novateurs et une nouvelle approche didactique qualifiée de polynomique .

 

Retrouvez l’article intégral en ligne gratuitement sur :
http://glottopol.univ-rouen.fr/telecharger/numero_35/gpl35_03colombelteuira_fillol.pdf

Résumé :

Comment l’école calédonienne construite sur le modèle (français) d’une école républicaine monolingue (1), utilisée comme instrument privilégié et efficace d’unification et de domination linguistiques, peut-elle prendre en compte la diversité linguistique et culturelle de ses élèves pour la réussite de tous (2) ? En d’autres termes, comment l’école calédonienne d’aujourd’hui peut-elle aider les élèves à se construire comme sujets plurilingues tout en s’appropriant la langue de scolarisation ? Comment former les enseignants à une didactique du plurilinguisme ou a minima à une didactique du français contextualisé dans un contexte où le plurilinguisme n’est pas « politiquement assumé » comme c’est le cas en Corse (Cortier et Di Meglio, 2018) ou en Polynésie française ? (Vernaudon, 2020). Comment traiter les usages langagiers des élèves ? Comment accueillir en classe, voire traiter didactiquement la variation linguistique (3) ?
En Nouvelle-Calédonie, ces questions se sont avérées centrales dans nos activités d’enseignantes-chercheures (formatrices) en sociolinguistique et didactique du français contextualisé. Elles nous ont conduites à développer des travaux sur une période de 20 ans tout en renouvelant nécessairement les concepts, méthodes, et postures de recherche (Colombel-Teuira & Fillol, 2020). Nous précisons par ailleurs que nous avons privilégié une approche systémique et compréhensive des questions langagières partant du principe que « pour produire du changement réel, et avancer vers une école plus inclusive, il vaut mieux soutenir l’existant plutôt que de prescrire l’idéal » (4).

Il s’agit pour nous d’envisager les questions centrales d’articulation entre les langues (et les différentes variétés de ces langues) mais aussi des fonctions des langues dans le cadre scolaire.
La question des attitudes inclusives (ou exclusives) des pratiques langagières (et de la variation sociolangagière) est une question vive (en France5 et plus largement dans la francophonie) au coeur de tensions et d’injonctions paradoxales (et mouvantes selon les programmes scolaires).
Ainsi, le point commun aux recherches-actions (Colombel-Teuira, Fillol & Bousquet, 2020) ou aux projets pédagogiques que nous accompagnons sont de participer à déconstruire le paradigme monolingue (et mononormatif) et de partir des besoins exprimés par les enseignants, élèves ou étudiants.
Pour suivre le fil esquissé par le titre de ce numéro thématique « la langue de l’école, de l’institution à la classe », la présente contribution s’articulera en trois parties : nous présenterons succinctement le contexte sociolinguistique dans lequel les contacts ou rapports aux langues sont ambivalents. Les parties suivantes seront consacrées à des outils (socio)didactiques visant à accompagner les enseignants à observer autrement les usages langagiers des élèves et à une étude de cas d’une recherche-collaborative qualifiée d’approche polynomique.

Notes :
(1) Dès le début l’administration coloniale du Territoire, les outils de domination de la langue française sur les langues kanak ont petit à petit été mis en oeuvre ; depuis les décrets interdisant l’usage (oral à l’école et écrit en toute circonstance) des langues kanak jusqu’à l’objectif principal des écoles indigènes : « Les écoles indigènes sont destinées à propager l’usage du français parmi les indigènes et à les initier à la pratique d’un métier. Elles sont donc surtout des écoles de langage et d’apprentissage » (Décret du 26 septembre 1902, article 1er).
(2) Cette question a été régulièrement retenue comme thème des débats sur l’avenir de l’école calédonienne.
(3) Nous faisons l’hypothèse à l’instar de S. Clerc-Conan et C. Richerme-Manchet que « le rapport à la langue de l’école se modifie grâce au sens donné à la variation linguistique (laquelle n’est plus vue en termes de « niveaux de langue » (2016 : 55).
(4) http://centre-alain-savary.ens-lyon.fr/CAS/education-prioritaire/ressources/theme-4-perspectives-relatives-au-pilotage-et-a-levaluation/francoise-lantheaume-coordination-regulation-cooperation-quels-defis-pour-les-metiers-en-education-prioritaire


L’ensemble des articles de la revue Glottopol, numéro 35 La langue à l’école, de l’institution à la classe : quelles conceptions, quelles normes, pour quels usages ? dirigé par Catherine Delarue-Breton et Elisabeth Bautier sont accessibles ici en ligne.


Claire COLOMBEL-TEUIRA  et Véronique FILLOL, « Variation et approche polynomique : pour une conception plurielle de la langue à l’école calédonienne», Glottopol / La langue à l’école, de l’institution à la classe : quelles conceptions, quelles normes, pour quels usages? [Online], 35 | 2021. URL :  http://glottopol.univ-rouen.fr/telecharger/numero_35/gpl35_03colombelteuira_fillol.pdf